Amiante dans les Hauts-de-France: la lutte pour l’éradication continue

«  Il n’est pas possible de parler de l’amiante sans évoquer l’ampleur du drame sanitaire que représente l’amiante et qui dépasse largement me cadre national […]Nous devons faire preuve de volontarisme et de pragmatisme sur le sujet. Je sais que vous avez cet esprit d’écoute et de dialogue et que vous avez le souci de garantir la protection des victimes mais aussi de prémunir les générations futures à ce risque majeur » . C’est en citant ces mots prononcés par le Président de la Région Xavier Bertrand qui était alors ministre de la Santé que j’ai débuté la présentation de la motion déposée en septembre 2021. Dans ce texte je proposais à la réprésentation régionale de lancer un groupe de travail consacré à la lutte contre l’amiante avec pour objectif d’accélérer son éradication sur notre territoire.

En 2022 lors du débat sur le Schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation ( SREDII) j’ai également déposé une contribution relayant les propositions des associations de défense des victimes de l’amiante. Cette contribution a fait consensus et a pu être en grande partie reprise dans le SREDII qui est un des documents de pilotage des politiques régionales.

On le sait, notre région a payé le prix fort de la désindustrialisation. Aux conséquences sociales et économiques lourdes, s’est ajoutée une catastrophe sanitaire et humaine silencieuse : celle de l’amiante.

Les usines sont parties, mais celles et ceux qui les ont fait tourner pendant des années sont restées et ont gardé bien des années plus tard encore marqués dans leur corps.

Les pollutions industrielles sont l’héritage de la désindustrialisation.

La question de l’amiante fait partie de ce lourd héritage. Notre région comme la plupart des anciennes grandes régions industrielles est au premier rang des territoires concernés.

L’exposition à la fibre d’amiante peut entraîner à moyen et long terme : des plaques pleurales, des pleurésies, l’asbestose ( fibrose pulmonaire) et des mésothéliomes, cancers qui touchent la plèvre, le péritoine et le péricarde.

Malgré son interdiction depuis 1997, l’amiante est toujours présent sur nos lieux de travail, dans les habitations anciennes et dans notre environnement quotidiennement. C’est pourtant un cancérigène avéré responsable d’environ 2 600 à 6 500 morts chaque année dont la nocivité est établie et documentée scientifiquement depuis le début du XXème siècle.

Selon le rapport n°37 du Sénat établi en 2005 par MM. Gérard Dériot ( Les Républicains) et Jean-Pierre Godefroy ( Groupe socialiste et républicain), l’amiante a tué près de 35 000 personnes en France entre 1965 et 1995. Le décompte macabre allant jusqu’à 100 000 morts sur la période 2005-2025.

Quelques chiffres édifiants : 93 % des hommes atteints d’un cancer de la plèvre ont été exposés à l’amiante. Le nombre de cancers liés à l’amiante chez les femmes a doublé entre 1998 et 2017.

Selon L’Organisation Internationale du Travail (OIT), 100 000 personnes meurent par ailleurs chaque année dans le monde des suites d’un empoisonnement à l’amiante.

La nécessite de l’action s’impose à différents niveaux. Le parlement européen a voté en 2021 un rapport réclamant un plan d’action européen coordonné pour l’éradication de l’amiante.

Le groupe de travail régional transpartisan dont je fais partie s’est à nouveau réuni ce lundi 26 février 2024. L’objectif est de proposer des mesures opérationnelles sur 3 volets:

-le volet « santé/prévention »

-le volet  » environnement »

le volet « emploi/formation »

Sur le volet « santé » la réflexion porte notamment sur le renforcement du dépistage des mésothéliomes et autres cancers liés à l’amiante. Nous sommes par ailleurs très inquiets et surpris des annonces du ministères de la Santé qui s’appête à mettre fin au dispositif de surveillance du mésothéliome pleural.
Ce programme national de surveillance du mésothéliome pleural (PNSM) existe pourtant depuis plus de vingt ans et permet de suivre l’évolution de la situation épidémiologique des mésothéliomes pleuraux, marqueurs spécifiques des expositions passées à l’amiante. Cette annonce, placée une fois de plus sous le signe de la  » rigueur budgétaire » et de l’austérité est catastrophique. Le tissus associatif des associations victimes de l’amiante interpelle le gouvernement à ce sujet, sans réponses à ce jour.

Sur le volet « environnement »: si l’on veut fournir aux acteurs économiques qui interviennent dans la secteur de la destruction de l’amiante les quantités suffisantes pour développer leur modèle économique, il nous faut densifier le maillage des déchetteries et points de collectes équipés pour recevoir les produits amiantés. Cette action doit se faire en concertation avec les collectivités locales et en lien avec les acteurs économique ( en particulier les PME et TPE, artisans) afin d’évaluer au mieux leurs besoins.

Enfin sur le plan de l’emploi et de la formation, le groupe de travail a accompagné et soutenu les projets de l’entreprise VALAME qui souhaite implanter sur le territoire régional sa première unité de destruction de l’amiante par processus chimique. L’arrivée potentielle d’EUROPLASMA dans les Hauts-de-France offre également une autre solution complémentaire pour éradiquer l’amiante par inertage. Dans le cadre de la réalisation du prochain Plan Régional de Formation qui doit être acté en fin d’année, il convient de reprendre contact avec les acteurs de la formations afin d’évaluer leurs besoins matériels.

Sur ce sujet de santé environnementale, l’intérêt général prime. Je continuerai avec mes collègues de gauche à m’impliquer pleinement dans les travaux de ce groupe de travail en apportant des propositions concrètes. Lors de la réunion, j’ai également émis le souhait que les associations de victimes de l’amiante soit plus étroitement associées à nos travaux. Par ailleurs, la Région doit réfléchir à une évolution de ses dispositifs d’aide en leur direction: de nombreuses associations rencontrent des difficultés pour pérenniser des emplois indispensables au bon suivi des dossiers amiante de leurs adhérents.

Julien Poix, conseiller régional des Hauts-de-France


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